Tracfin : un record historique de déclarations de soupçon en 2024 et ses implications pour la LCB-FT

# Tracfin : un record historique de déclarations de soupçon en 2024 et ses implications pour la LCB-FT

Le service de renseignement financier français, Tracfin, a franchi une étape historique en 2024 en recevant un nombre record de **plus de 211 000 déclarations de soupçon (DS)**. Ce chiffre, en hausse de 13,2 % par rapport à 2023, représente un doublement du volume déclaratif en seulement quatre ans. Cette explosion témoigne d’une prise de conscience accrue des professionnels assujettis et de l’impact de la digitalisation sur les processus de signalement.

## Une progression fulgurante des signalements

En 2024, Tracfin a enregistré **215 410 informations**, dont 211 165 déclarations de soupçon transmises par les cinquante professions concernées par le dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT). Cette dynamique de croissance est le fruit de plusieurs facteurs, notamment les efforts de sensibilisation déployés par Tracfin et l’adoption d’outils numériques facilitant ces déclarations.

### Le rôle prédominant du secteur financier

Le secteur financier demeure, de loin, le principal pourvoyeur de déclarations, contribuant à **93,1 % du flux total**. Les banques et les établissements de crédit et assimilés sont à l’origine de plus de la moitié des signalements (57,2 %).

Une tendance majeure est l’implication croissante des établissements de paiement, des établissements de monnaie électronique et, de manière spectaculaire, des **Prestataires de Services sur Actifs Numériques (PSAN)**. Ces derniers ont transmis 3 073 DS en 2024, soit une augmentation impressionnante de 112,1 % par rapport à 2023. Cette forte progression est directement liée au développement rapide des nouvelles pratiques économiques et des technologies liées aux crypto-actifs.

### L’éveil progressif du secteur non financier

Le volume de signalements émanant du secteur non financier a également connu une hausse notable de **25,7 %** en 2024. Bien que sa part dans le flux global reste limitée (6,9 %), la contribution de ces professionnels est essentielle, notamment en raison de la nature spécifique des informations financières auxquelles ils ont accès.

Certaines professions non financières affichent des augmentations particulièrement significatives. Le secteur de l’art et du luxe, par exemple, a vu son activité déclarative augmenter de **254,4 %**, avec 287 déclarations en 2024.

Cependant, des disparités persistent. Alors que 75 000 avocats sont en activité, seuls 15 ont transmis des déclarations de soupçon en 2024. De même, la profession d’agent sportif n’a jamais adressé de déclaration, malgré un risque élevé de blanchiment de capitaux. Ces écarts soulignent la nécessité d’une meilleure appropriation du dispositif par l’ensemble des acteurs concernés.

## Qualité versus quantité : un défi majeur

Au-delà du nombre, Tracfin insiste sur l’importance de la **qualité des déclarations de soupçon**. Une déclaration utile est une déclaration complète, documentée et argumentée. Le rapport 2024 met en évidence que de nombreuses informations reçues sont malheureusement inexploitables, ce qui représente un défi majeur pour l’efficacité des investigations.

## Perspectives et évolutions réglementaires

Le cadre de la LCB-FT est en constante évolution. En 2024, deux nouvelles professions ont été assujetties à l’obligation de déclaration : les entreprises de Jeux à objets numériques monétisables (JONUM) et les gestionnaires de crédit.

L’adoption du 6e paquet LCB-FT européen au printemps 2024 prévoit l’intégration prochaine d’autres professionnels, tels que les négociants de biens de grande valeur et les clubs de football professionnels. Ces extensions visent à renforcer davantage le maillage du dispositif et à couvrir de nouveaux pans de l’économie.

Tracfin souligne également la nécessité d’une approche plus systémique et intelligente de la LCB-FT, incluant le développement d’outils basés sur l’**intelligence artificielle** pour améliorer l’analyse et l’efficacité des traitements. Une meilleure coordination avec les autorités de contrôle et une politique de retour d’information aux déclarants sont également des axes d’amélioration prioritaires.

En conclusion, le rapport 2024 de Tracfin marque une étape significative dans la lutte contre la criminalité financière. La croissance record des déclarations est encourageante, mais les défis liés à la qualité des informations et à l’implication hétérogène des professions demeurent. La vigilance et l’adaptation des pratiques restent primordiales pour tous les acteurs assujettis.

Pour une compréhension approfondie des enjeux de la LCB-FT et de l’impact de ce rapport Tracfin sur la conformité des professionnels assujettis, continuez à vous informer activement.